La pérennité d'un verger est intimement liée à la qualité du matériel végétal dont il est issu : qualité variétale ou encore porte-greffe adaptés. Les producteurs antillais ont d'ailleurs mesuré les risques que peuvent encourir les plantations lorsque une nouvelle maladie arrive sur l'île si le matériel végétal planté n'est pas adapté (cas du virus de la Tristéza arrivé en 2000 et dont les plantations d'agrumes sur Bigaradier ont peu à peu périclité). Choisir l'espèce à planter, choisir la technique de multiplication adaptée, choisir le porte-greffe, nécessitent d’acquérir de solides compétences. Voici quelques clés d’acquisition de ces connaissances.
Partant du constat que la plupart des graines sont issues d’une fécondation, ces dernières transmettent donc le patrimoine génétique des 2 parents, ayant pour conséquence des différences plus ou moins importantes entre les parents et sa descendance. Dans ces conditions, pour reproduire à l’identique une variété sélectionnée des précautions doivent être prises : soit utiliser des semences rigoureusement sélectionnées, soit se servir de semences végétatives naturellement produites par les plantes (rejets de souche, stolons, bulbilles…) ou soit encore créer des semences végétatives (boutures, marcottes et greffage). Nous développerons plus particulièrement ces derniers modes de multiplication mais avant tout voici les caractéristiques indispensables pour sélectionner une bonne semence végétative :
Le choix de la semence végétative doit être en accord avec les buts et les contraintes de la culture car il déterminera :
Ces techniques de multiplication sont séduisantes car faciles à mettre en œuvre. Les plants qui en sont issus sont fidèles au pied mère et la mise à fruit est généralement rapide. Cependant, ces plants ont un défaut majeur : l’enracinement. Ce dernier reste en effet souvent superficiel, les plants sont alors peu résistants aux vents (sujets au déracinement). Ces modes de multiplication sont donc à réserver aux espèces à faible développement, en hauteur (grenadier, maracuja…) ou aux espèces n’ayant pas d’autre mode de multiplication (le litchi par exemple).
Pour toutes les raisons évoquées précédemment, le greffage semble être la technique de multiplication la plus appropriée aux cultures fruitières pérennes car il permet d’associer un greffon (morceau de la plante mère) à un porte-greffe (issus d’une graine lui conférant donc un bon enracinement). Ainsi, le greffon apportera au plant les qualités de la plante mère : la qualité des fruits, les rendements, la précocité ou la tardiveté de production, la résistance aux maladies ou ravageurs, le port et la vigueur de l’arbre … Le porte-greffe apportera quant à lui : la vigueur de l’arbre, la forme de l’enracinement (résistance aux vents), la résistance aux maladies ou ravageurs du sol…
Si le choix du greffon (la variété à multiplier) semble aisé, celui du porte-greffe est plus délicat mais tout aussi primordial. Ainsi, le greffon et le porte-greffe doivent être de la même espèce botanique (au pire de la même famille botanique) ceci afin d’obtenir une bonne affinité entre eux deux. Pour les agrumes, la création et la sélection de porte-greffe menées dans de nombreux pays offrent des choix importants . Les principaux porte-greffes validés aux Antilles sont : Citrus volkameriana, le citrumello 4475, le Poncirus trifoliata cv Flying Dragon (donne de petits arbres), le mandarinier Cléopâtre (supporte les sols calcaires)… Pour le manguier, il convient d’utiliser des porte-greffe de variétés dites polyembryonnées (mango fil par exemple). Pour le goyavier, greffer sur Psidium friedrichsthalianum
. Ce dernier présente l’intérêt d’être résistante à un nématode (Meloidogyne mayaguensis
) des racines du goyavier qui sévit actuellement en Martinique. Pour les autres espèces, si aucun porte-greffe n’est connu, il convient de greffer la variété sur elle-même (plant issu d’une graine). Le type de greffe dépendra ensuite de l’espèce, nous vous proposons d’en découvrir quelques uns, en images…
Photo 1 - Le porte-greffe (Citrus volkameriana ) a été préparé : les feuilles et épines sont supprimées, la partie d’écorce du porte-greffe où le greffon sera plaqué est enlevée et pause du greffon sur le porte-greffe. Photo 2 - Greffon posé et quasiment invisible. Photos 3 - Ligature. Photo 4 - Plant greffé.
Note : cette technique de greffage des agrumes est préférée à l’écussonnage classique (en T) car elle peut être réalisée toute l’année, nul n’est besoin, en effet, d’attendre que le porte-greffe et le greffon soient en sève ; condition normalement indispensable pour soulever l’écorce et poser l’écusson.
Photo 1- Préparation du porte-greffe, le porte-greffe est coupé et la coupe rafraîchie. Photo 2- Taille en biseau simple du greffon de la variété. Photo 3- L’écorce du greffon est légèrement grattée pour une mise en contact optimale des cambiums. Photo 4- Pause du greffon sous l’écorce du porte-greffe. Photo 5- Plant ligaturé.
Note : cette technique peut aussi être utilisée dans le cas du surgreffage, par exemple du manguier.
Photo 1- Préparation du porte-greffe : un biseau simple est effectué sur le porte-greffe, une entaille est effectuée au 2/3 du biseau. Le greffon est préparé de la même façon. Photo 2- Assemblage du greffon et du porte-greffe. Photo 3- Greffon et porte-greffe parfaitement assemblé. Photo 4 - Ligature.
Note : cette technique est utilisée pour multiplier les espèces difficiles, la variante de cette greffe (l’anglaise simple) se pratique de la même façon sans qu’il n’y ait les 2 entailles des biseaux.
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